
Église Saint-Vigor (XIVe-XVIIe)
L’église Saint-Vigor est le seul monument de la période médiévale qui subsiste à Louvigny. C’est donc un important témoin de son histoire.
Pendant la bataille de Louvigny, en Juillet 1944, l’église a beaucoup souffert. La nef et le chœur ont été si touchés qu’il a fallu les reconstruire en grande partie, d’où l’aspect très neuf des pierres et de nombreux éléments du décor. Cependant l’architecte chargé des travaux n’a pas modifié le plan et le volume du bâtiment cherchant, avant tout, semble-t-il, à rétablir les dispositions qui existaient avant la guerre. En revanche, la tour-clocher n’a subi que peu de dommages.
L’église de Louvigny se compose d’une nef, d’un chœur, orientés vers l’Est, et d’une tour-clocher servant aussi de porche, accolée à l’extrémité occidentale. Ces trois parties n’ont pas été élevées en même temps ; elles ont remplacé, à différentes étapes, des édifices plus anciens dont il ne reste rien sauf probablement des vestiges dans le sol même de l’église. La nef qui appartient au style gothique est apparemment la partie la plus ancienne. On peut le voir à plusieurs indices : d’abord, au fait que les deux autres parties (le chœur et la tour) prennent appui contre elle, ce qui est l’argument le plus fort. Ensuite des indications peuvent être trouvées dans le percement des murs par des baies étroites et hautes, dans les voûtes qui sont légèrement bombées, s’appuyant donc lourdement sur les murs latéraux, sans être portées par des arcs plaqués contre ces murs qu’on appelle formerets, [1] dans le volume et la forme des contreforts à l’extérieur, enfin dans la décoration (chapiteaux, moulures des arcs).
Si tous ces éléments n’ont pas été trop modifiés à la reconstruction, on pourrait avancer la deuxième moitié du XIIe siècle. Il faut tenir compte du fait qu’il s’agit d’une église rurale où, malgré la proximité de Caen, les influences architecturales et décoratives ont un certain retard par rapport aux grands monuments gothiques de la ville voisine (chœur de Saint-Étienne, Saint-Pierre, Saint-Jean, Salle des Gardes).
II est certain que le chœur vient en second lieu. Pour s’en convaincre, il suffit de s’avancer un peu au-delà de l’autel et d’observer la jonction de la nef et du chœur. On voit nettement que la voûte du chœur, plus haute que celle de la nef, repose sur l’arc d’entrée de celle-ci : donc le chœur ne peut être que postérieur à la nef.
De plus, le style est différent, plus évolué : les arcs sont plus aigus, les voûtes ne sont presque plus bombées, le décor est plus riche et plus réaliste.
On trouve là quelques éléments caractéristiques du gothique normand.
L’ensemble évoque le XlVe siècle.
Cette nef et ce chœur gothiques ont probablement remplacé un édifice d’époque romane.
Au siècle dernier, Arcisse de Caumont a décrit dans sa Statistique Monumentale du Calvados (1846) « une corniche ornée de moulures en damier » qu’on ne voit plus aujourd’hui mais qui prouve l’existence d’une nef romane dont les murs ont peut-être subsisté à la période gothique, les baies ayant seulement été remplacées dans le nouveau style.
La tour est la partie la mieux conservée : elle est, de ce fait, classée « Monument Historique ».
Elle se divise, dans le sens de la hauteur, en trois niveaux.
- Au rez-de-chaussée, un porche couvert d’une voûte sur croisée d’ogives.
Au premier étage, une petite salle. À la place de la clef, un oculus, c’est-à-dire un trou circulaire pour le passage des cordes.
- Au second étage, la salle des cloches …surmontée par un toit en bâtière, construit en pierre.
Les trois niveaux sont réunis par un escalier à vis, accolé sur le flanc sud de la tour et nettement affiché à l’extérieur. La décoration, notamment les fines moulures des pieds-droits et la modénature [2] des ogives indiquent le XVe siècle. Sans être un chef-d’œuvre de l’architecture médiévale, la tour-clocher de Louvigny a de bonnes proportions. Elle apparaît de loin au-dessus de la futaie du château.
Grâce à la technique de datation appelée dendrochronologie [3] on peut affirmer d’une façon certaine que la tour-clocher remonte à la première moitié du XVe siècle, en tout cas avant 1450.
Document réalisé par Jacques Le Richeux, à partir de l’article écrit par M. Joseph Decaëns LOUPY, bulletin municipal de Louvigny.