La communauté paroissiale a célébré les trente années diaconales de Philippe Marc (avril 2018). Retrouvons les grandes étapes de son parcours qu’il a rappelé dans son homélie du jour.
Frères et sœurs,
Je remercie frère Jean-Pierre de marquer aujourd’hui mes trente ans de diaconat qui correspondent à 3 jours près à mon 75ème anniversaire et c’est pour moi l’occasion de rendre grâce au Seigneur pour ces trente ans de service. On ne devient pas diacre par hasard, le hasard c’est Dieu qui se promène incognito, disait Albert Einstein. C’est au terme d’un long cheminement que la vocation naît et je voudrais rendre grâce pour quelques moments déterminants de ce cheminement.
Première rencontre avec Charles de Foucauld
Tout d’abord je rends grâce pour ma première rencontre avec Charles de Foucauld et je vais vous faire des confidences. J’avais 11 ans et j’avais trouvé dans la rue un billet de 10 francs, des anciens francs bien sûr à l’époque et je l’ai donné à mon père qui m’a dit d’en remettre la moitié à la quête du dimanche suivant et de faire ce que je voulais de l’autre moitié. Avec ces 5 francs j’ai acheté un livre que j’avais repéré dans la vitrine du libraire voisin « L’appel du Silence, de Léon Poirier », c’était le synopsis et les photos du film sur Charles de Foucauld tourné en 1936. Cette rencontre avec le père de Foucauld a été déterminante dans mon cheminement, comme quoi, 5 francs, même anciens peuvent être un bon placement.
Conférence Saint Vincent de Paul des Jeunes
Quelques années après je faisais partie au Lycée de la Conférence Saint Vincent de Paul des Jeunes et nous allions tous les jeudis, c’était le jour de congé à l’époque, visiter les personnes isolées et les malades à l’hôpital de Lisieux, dans les grandes salles d’une quarantaine de lits. C’est là que j’ai commencé à comprendre l’évangile de Matthieu : « Ce que vous faites au plus petit de mes frères, c’est à moi que vous le faites. »
Appelé au diaconat
Plus tard, c’était à l’Ascension 1985, j’ai ressenti un appel impérieux à me mettre au service de l’Église, je suis allé m’en ouvrir auprès de mon père spirituel qui m’a incité à la réflexion et j’ai rencontré le père Bernard Simon, vicaire général et responsable du diaconat à cette époque, qui m’a dit de commencer le cheminement et nous avons, avec mon épouse, suivi les enseignements du Centre Diocésain de Formation. En 1988, l’Église en la personne de Mgr Badré m’a officiellement appelé au diaconat, il n’est pas de vocation dans l’Église qui ne soit ratifiée par un appel. « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi mais moi je vous ai choisi » dit Jésus dans l’évangile de saint Jean.
La spiritualité du frère Charles m’a toujours attiré par sa simplicité, sa discrétion, par sa proximité auprès de chacun, par son imitation de la vie de Jésus à Nazareth, par la fraternité en actes et en vérité, il se disait lui-même frère universel, et par ce désir d’être le levain dans la pâte sans prosélytisme tapageur. L’Eucharistie, la parole de Dieu et la prière sont les piliers de cette spiritualité.
J’ai donc été ordonné le 10 avril 1988 avec un autre diacre Paul, qui malheureusement est décédé en 1992.
Charles de Foucauld écrivait dans sa retraite de diaconat en 1901 : « Les diacres sont les mains de Jésus ; c’est par elles que Jésus distribue le triple pain dont il nous nourrit : pain matériel, Pain de la parole divine, Pain de l’Eucharistie. Ils doivent avoir la charité, la bienfaisance, la bonté qui animent les mains de Jésus. » Tout un programme. Le ministère du diacre est en effet tout à la fois service de la Charité, de la Parole, et de la Liturgie.
Je rends grâce pour les différentes missions que j’ai assumées pendant ces trente ans. Le père Badré m’avait demandé de passer une maîtrise de droit canonique, ce que j’ai fait à la faculté de théologie de Strasbourg par correspondance et sessions sur place. Parallèlement j’étais aumônier du Lycée Frémont à Lisieux. Sans l’aide du Saint-Esprit, cela n’aurait pas été possible. Ce fut néanmoins difficile, j’étais expert-comptable et commissaire aux comptes à Lisieux et Il ne fallait pas négliger la vie professionnelle ni la vie familiale avec 4 enfants. Puis, le diplôme de droit canonique en poche, ce fut la mission d’avocat ecclésiastique à l’officialité, le tribunal de l’Église, pour introduire, plaider et suivre les causes de nullités de mariage, ce que j’ai fait pendant 27 ans. Cette mission m’a permis d’accompagner et d’être proche de personnes en difficultés psychologiques et morales, j’ai traité environ 250 causes mais accompagné aussi beaucoup d’autres qui ne pouvaient relever d’une telle procédure, tous les mariages malheureux ne sont pas nuls. J’ai beaucoup appris auprès de ces personnes et cela m’a rendu de grands services dans les préparations aux mariages que j’ai célébrés.
En même temps, pendant une douzaine d’années, j’ai été conseiller spirituel d’un groupe de patrons chrétiens les EDC, Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens. Ma profession me rendait proche d’eux et me permettait de mieux comprendre leurs problèmes. Pendant toute mon activité professionnelle la proximité de terrain avec mes clients et leurs salariés a été essentielle, parce que le diacre est présence d’Église dans son milieu de vie familiale et professionnelle, j’ai souvent été interpellé et j’y ai célébré de nombreux baptêmes, mariages et inhumations. J’ai été aussi pendant 8 ans de 2004 à 2012, délégué diocésain au diaconat succédant ainsi au père François Pavy. Enfin depuis 5 ans je suis aumônier du centre de soins de suite Bétharram et de l’unité de soins palliatifs Abiven à Hérouvile. Et tour à tour j’ai été en paroisse à Hermival-les-vaux près de Lisieux puis à Lisieux même et maintenant ici à Saint-François-des-Odons.
Je rends grâce enfin pour mon épouse Marie-Thérèse, pour sa patience, son soutien, sa compréhension pendant toutes ces années. Il n’est pas
évident de concilier à la fois la vie familiale, la vie professionnelle et les missions ecclésiales, cela lui a demandé certains renoncements et beaucoup d’indulgence. Je rends grâce aussi pour mes enfants qui n’ont jamais manifesté de réticence et qui m’ont accompagné dans mon engagement.
Je regrette que l’institution Église n’ait pas investi plus dans la connaissance et la promotion du diaconat auprès des fidèles. Voilà plus de 50 ans que ce ministère a été restauré et beaucoup de fidèles ne voient le diacre que dans son service liturgique à l’autel et des confusions existent dans l’esprit de beaucoup notamment avec les personnes instituées pour les funérailles qualifiées de diacres, de diaconesses voire de diacresses !
L’ordination diaconale associe le diacre à la mission de l’évêque ; elle le consacre pour la vie au service de l’Eglise et de ses frères. Elle signifie le don fait aux hommes par Dieu. Elle enracine le service dans la charité et non dans la simple générosité. Elle est signe d’attention pour les plus petits.
Canoniquement, 75 ans est l’âge auquel on se retire, aussi tout en continuant le service des malades à Betharram et Abiven, vous me verrez moins souvent à l’autel, je vais me faire plus discret laissant la place à mon frère Didier que j’ai interpellé pour le diaconat quand j’étais délégué diocésain.
Mon Père, Je m’abandonne à toi, fais de moi ce qu’il te plaira, quoique tu fasses de moi, je te remercie, je suis prêt à tout, j’accepte tout pourvu que ta volonté se fasse en moi et en toutes tes créatures, je ne désire rien d’autre ô mon Dieu, je remets mon âme entre tes mains, je te la donne mon Dieu avec tout l‘amour de mon cœur parce que je t’aime et que ce m’est un besoin de me donner, de me remettre entre tes mains sans mesure parce qui est mon Père. Amen
Philippe
Obsèques
Une messe de souvenir et d’action de grâce a été célébrée samedi 20 février à 10 h 30 à Bretteville.
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